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Soutenons Vittorio de Filippis

publié le dimanche 21 décembre 2008

L’Association des Journalistes de Toulouse et de Midi-Pyrénées (AJT-MP), et ses membres, se disent indignés et préoccupés par le procédé mis en œuvre par la justice pour signifier sa mise en examen à notre confrère Vittorio de Filippis, ancien directeur de « Libération ». Indignés par les circonstances de son interpellation ainsi que par l’humiliation qui lui a été faite avant sa présentation devant le juge. Préoccupés par cette récidive de la disproportion judiciaire dans les affaires de presse. Notre démarche, engendrée par cet événement, concerne également les cas de nos confrères Denis Robert, Guillaume Dasquié, Bruno Thomas, Jean-Michel Gouin, mis en examen non pas sur le soupçon d’avoir divulgué de fausses informations, mais pour le seul fait d’en avoir obtenu. Nous nous alarmons de ne pas ressentir dans cette suite alarmante d’abus manifestes, la seule dérive de fonctionnaires zélés, mais d’y déceler au contraire l’empreinte plus sombre d’une volonté politique qui n’ose pas avouer son véritable dessein. Les déclarations lapidaires du ministre de la Justice Rachida Dati et du ministre de l’Intérieur Michèle Alliot-Marie venant cautionner ces excès, témoignent d’une volonté pernicieuse de dévaluer des principes inhérents au droit de la presse pour, à terme, banaliser l’intervention de la force publique et de la Justice dans nos rédactions, nos bureaux, nos domiciles. Nous nous refusons à banaliser ces événements car nous craignons qu’ils ne soient que les signes avant-coureurs d’une reprise en mains plus drastique. On a certes vu Nicolas Sarkozy se précipiter au chevet de la grogne avec les cautères habituels. Mais qui a inspiré cette liberté de ton prise par ses ministres aussitôt démenties ? Nous relevons avec inquiétude que la procédure de « diffamation », opposée à notre confrère Vittorio de Filippis, concernerait un commentaire d’un lecteur sur le site de « Libération » qui porterait atteinte à l’honneur du PDG de Free. Quant à Bruno Thomas, il est incriminé pour « espionnage industriel », pour avoir obtenu des images que Renault ne voulait pas voir publier. Est-ce à dire que désormais nous devrions soumettre nos articles – et les avis de nos lecteurs - à fin d’agrément aux chefs d’entreprise que nous citons ? Est-ce à dire, pour d’autres cas, que nous devrions faire viser par les enquêteurs ou les magistrats les investigations que nous conduisons dans le cas de fait divers ? Enfin, est-ce à dire que le simple fait qu’une tierce personne dépose une plainte nous condamne à être réveillés au petit jour, perquisitionnés et placés dans les souricières ? Qu’y a-t-il de prévu si le tribunal dit que le PDG de Free n’a pas été diffamé ? Si Renault est débouté de sa plainte ? Faut-il croire que désormais la seule requête d’une personne morale ou privée suffit à provoquer interpellation, perquisition et coup de force judiciaire ? Il est à craindre que le mal soit déjà fait. Il y aura peut-être moins de menottes, peut-être moins de « racaille », peut-être moins de confrères à poil… Mais qui dit que, sous une forme peut-être plus policée, cette technique ne tournera pas au procédé ? Car au-delà de l’éruption d’indignation qui ne manquera pas de retomber, il est un message qui n’a sans doute pas échappé à certains stratèges : il suffit désormais de se constituer partie civile auprès du premier magistrat venu pour compromettre la parution d’un article ou d’avoir la certitude qu’en cas de publication, l’auteur boira son audace jusqu’à la lie. Ce dispositif simplissime a le mérite d’être opérant avant même que la plainte soit instruite et jugée. C’est peut-être là l’essentiel. De fait, nous ne pouvons que nous indigner du caractère opérationnel de ce procédé qui permet, in fine, à une entreprise ou à une personne privée d’utiliser un juge pour obtenir une lettre de cachet. Nous demandons une réforme en profondeur, de la procédure inhérente à ce qu’il convient d’appeler encore « les délits de presse ». On nous dit déjà que cette requête fait l’objet d’une « réflexion », mais nous exigeons que des professionnels y soient associés.

L’AJT-MP

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